RESERVE DE LIQUIDATION : DE NOUVELLES REGLES ENTRENT EN VIGUEUR ! - fiduciaire-finacces

RESERVE DE LIQUIDATION : DE NOUVELLES REGLES ENTRENT EN VIGUEUR !

La loi-programme du 18 juillet 2025 publiée au Moniteur belge en date du 29 juillet 2025 entérine les nouvelles règles qui régissent dès à présent le régime VVPR-ter ou plus communément appelé « réserve de liquidation ».

Petit retour sur ce régime avantageux.

Réserve de liquidation ou VVPR-ter :

De quoi s’agit-il ?

Mis en place à la suite de la suppression de l’application du taux réduit de 10% de précompte mobilier sur les bonis de liquidation par le Gouvernement Di Rupo, le régime VVPR-ter concerne les dividendes issus de réserves de liquidation, permettant de profiter d’un précompte mobilier réduit après un délai d’attente, sous conditions. Régime à ne pas confondre avec celui du VVPR-bis, ce dernier s’appliquant aux nouvelles actions nominatives après apport en capital (pour plus d’informations, voir notre article sur le sujet juste ici https://fiduciaire-finacces.be/le-nouveau-regime-du-vvpr-bis/ ).

L’objectif est de permettre aux PME de transformer une partie de leur bénéfice en une réserve fiscalement avantageuse pour une distribution future à un taux réduit de précompte mobilier au lieu des 30% appliqués actuellement sur les dividendes ordinaires.

Comment ça fonctionne ?

Premier point : la constitution de la réserve

La constitution d’une réserve de liquidation se fait sur base du bénéfice après impôts de l’exercice en cours de clôture moyennant le versement immédiat d’une cotisation distincte de 10% du montant net de la réserve ; cotisation qui sera payée avec l’impôt de l’exercice.

Exemple : La société BX a réalisé au 31/12/2020 un bénéfice après impôts de 35.000,00 €. Lors de l’affectation du résultat, il est décidé par l’Assemblée Générale de juin 2021 d’imputer la totalité du bénéfice à une réserve de liquidation.

  • Réserve de liquidation : 35.000,00 € / 1,10 = 31.818,18 €
  • Cotisation distincte : 31 818,18 € x 10% = 3.181,82 €

Les 3.181,82 € de cotisation distincte viendront s’ajouter à l’impôt de l’exercice et seront payés en une seule fois.

Pour pouvoir conserver et bénéficier de l’avantage d’un taux réduit à 5% lors de la distribution de la réserve, la somme doit être « bloquée » pour une durée de 5 ans à compter de la fin de l’exercice de sa constitution jusqu’à l’Assemblée Générale qui décide de la distribution.

Dans l’exemple de la société BX, la réserve de liquidation doit rester intouchée jusqu’à l’Assemblée Générale de juin 2026 qui pourra alors décider de distribuer – ou non – l’intégralité de la réserve à partir du bilan clôturé au 31/12/2025.

Second point : la distribution partielle ou totale de la réserve

Il y a trois cas de figure possibles lors d’une distribution partielle ou totale d’une réserve de liquidation.

Distribution avant le terme de 5 ans

Dans l’hypothèse d’une distribution partielle ou totale de la réserve de liquidation avant le terme du délai d’attente de 5 ans, la société perd le bénéfice du taux réduit. Le dividende est alors soumis à un taux de 20% afin d’obtenir une taxation totale qui avoisine les 30%, taux appliqué aux dividendes ordinaires.

Reprenons notre exemple : l’Assemblée Générale de la société BX décide en juin 2023, pour les besoins privés de son actionnaire, de distribuer la totalité de la réserve de liquidation constituée au 31/12/2020 lors du bilan clôturé au 31/12/2022.

  • Réserve de liquidation : 31.818,18 €
  • Précompte mobilier sur dividende : 31.818,18 € x 20% = 6.363,64 € à payer
  • Dividende net distribué : 31.818,18 € – 6.363,64 € = 25.454,54 €

Cette situation génère un impôt global de 9.545,46 € (3.181,82 € de cotisation distincte + 6.363,64 €) soit un taux d’imposition moyen de 27,27% (9.545,46 € / 35.000,00 €) ce qui reste tout de même moindre que les 30% sur les dividendes ordinaires (35.000,00 € x 30% = 10.500,00 €).

Distribution après le terme de 5 ans

Dans l’hypothèse d’une distribution partielle ou totale de la réserve de liquidation au terme du délai d’attente de 5 ans, la société maintient le bénéfice du taux réduit. Le dividende est alors soumis à un taux de 5% afin d’obtenir une taxation totale qui avoisine les 15%, taux également appliqué aux dividendes du régime VVPR-bis.

Reprenons notre exemple : l’Assemblée Générale de la société BX décide en juin 2026 de distribuer la totalité de la réserve de liquidation constituée au 31/12/2020 lors du bilan clôturé au 31/12/2025.

  • Réserve de liquidation : 31.818,18 €
  • Précompte mobilier sur dividende : 31.818,18 € x 5% = 1.590,91 € à payer
  • Dividende net distribué : 31.818,18 € – 1.590,91 € = 30.227,27 €

Cette situation génère un impôt global de 4.772,73 € (3.181,82 € de cotisation distincte + 1.590,91 €) soit un taux d’imposition moyen de 13,64% (4.772,73 € / 35.000,00 €) ce qui reste également plus intéressant que les dividendes soumis au régime du VVPR-bis (35.000,00 € x 15% = 5.250,00 €).

Distribution lors de la liquidation

Dans ce cas précis, les réserves de liquidation, quelle que soit leur date de constitution, sont distribuées sans prélèvement de précompte mobilier ; elles sont donc nettes d’impôt. 

VVPR-ter, ce qui CHANGE !

Les modifications se portent sur deux éléments clés.

Premièrement, une augmentation du taux du précompte mobilier lors d’une distribution partielle ou totale qui passe de 5% à 6,5% ; ce qui donne une taxation totale de 15% des sommes placées en réserve de liquidation au lieu des 13,64% actuellement. Avec ce nouveau taux, le régime VVPR-ter s’aligne donc sur celui du VVPR-bis.

Deuxièmement, une réduction du délai d’attente avant distribution qui passe de 5 ans à 3 ans.

Troisièmement, le taux de 20% appliqué en cas de distribution partielle ou totale avant la fin du délai de conservation disparait au profit du taux ordinaire de 30%.

Ces modifications sont à appliquer aux réserves de liquidation constituées à partir du 1er janvier 2026.

Reprenons notre exemple : la société BX a réalisé au 31/12/2026 un bénéfice après impôts de 35.000,00 €. Lors de l’affectation du résultat, il est décidé d’imputer la totalité du bénéfice à une réserve de liquidation.

  • Réserve de liquidation : 35.000,00 € / 1,10 = 31.818,18 €
  • Cotisation distincte : 31 818,18 € x 10% = 3.181,82 €

Les 3.181,82 € de cotisation distincte viendront s’ajouter à l’impôt de l’exercice et seront payés en une seule fois.

En juin 2030, l’Assemblée Générale de la société BX décide de distribuer la totalité de la réserve de liquidation constituée au 31/12/2026 lors du bilan clôturé au 31/12/2029 (délai de 3 ans).

  • Réserve de liquidation : 31.818,18 €
  • Précompte mobilier sur dividende : 31.818,18 € x 6,5% = 2.068,18 € à payer
  • Dividende net distribué : 31.818,18 € – 2.068,18 € = 29.750,00 €

Cette situation génère un impôt global de 5.250,00 € (3.181,82 € de cotisation distincte + 2.068,18 €) soit un taux d’imposition moyen de 15% (5.250,00 € / 35.000,00 €) ce qui confirme bien l’alignement possible du régime du VVPR-ter à celui du VVP-Bis (35.000,00 € x 15% = 5.250,00 €).

En cas de distribution partielle ou totale avant la fin du délai d’attente de 3 ans, le taux ordinaire de 30% s’applique.

MAIS quid des réserves de liquidation déjà constituées ?

C’est ici que se glisse la petite subtilité des nouvelles règles entérinées par la loi-programme. Pour les réserves de liquidation constituées au plus tard le 31 décembre 2025, plusieurs cas de figure seront à présent possibles :

  • Si la distribution intervient après une période de conservation de la réserve d’au moins 5 ans à compter de sa date de constitution, le taux appliqué reste de 5%;
  • Si la distribution intervient après une période de conservation comprise entre 3 et 5 ans à compter de sa date de constitution, le taux appliqué sera alors de 6,5%;
  • Si la distribution intervient après une période de conservation de moins de 3 ans à compter de sa date de constitution, le taux appliqué est de 20%.

Les nouvelles réserves constituées à partir du 1er janvier 2026 seront toujours soumises au taux de 6,5%, quel que soit le délai de conservation après les 3 ans.

Reprenons notre exemple : l’Assemblée Générale de la société BX décide en juin 2025 de distribuer la totalité de la réserve de liquidation constituée au 31/12/2020 lors du bilan clôturé au 31/12/2024. Il s’est donc écoulé 4 années depuis la création de la réserve ; nous sommes donc dans le cas de figue d’une réserve constituée au plus tard le 31/12/2025 et distribuée après une période de conservation comprise entre 3 et 5 ans.

  • Réserve de liquidation : 31.818,18 €
  • Précompte mobilier sur dividende : 31.818,18 € x 6,5% = 2.068,18 € à payer
  • Dividende net distribué : 31.818,18 € – 2.068,18 € = 29.750,00 €

Cette situation génère un impôt global de 5.250,00 € (3.181,82 € de cotisation distincte + 2.068,18 €) soit un taux d’imposition moyen de 15% (5.250,00 € / 35.000,00 €) ce qui confirme bien l’alignement possible du régime du VVPR-ter à celui du VVP-Bis (35.000,00 € x 15% = 5.250,00 €).

Si la société BX avait conservé cette réserve de liquidation jusqu’au terme des 5 ans, comme c’est toujours possible pour les réserves constituées jusqu’au 31 décembre 2025, le précompte mobilier sur dividende aurait été de 1.590,91 € (31.818,18 € x 5%) ; voir notre exemple détaillé sous la rubrique « Distribution après le terme de 5 ans ».

D’autres nouveautés ?

Il est à noter également qu’en ce qui concerne le régime VVPR-bis, le taux de 20% sur les dividendes alloués ou attribués lors de la répartition bénéficiaire du 2e exercice comptable est supprimé pour les distributions liées à des apports effectués à partir du 1er janvier 2026. Ce sera donc le taux ordinaire de 30% qui devra être appliqué, cela afin que ne bénéficient d’un taux réduit que les réserves conservées pendant au moins 3 ans, comme dans le régime VVPR-ter.

N’y a-t-il, dès lors, plus de différences entre le régime VVPR-Bis et le régime des réserves de liquidation ?

Vous aurez remarqué que dans le cas de la réserve de liquidation, vous devez payer anticipativement 10 % d’impôts supplémentaires. Alors, pourquoi privilégier tout de même la réserve de liquidation si les deux régimes se sont alignés ?

Le premier avantage intervient en cas de liquidation de la société. En effet, lors de celle-ci, le boni de liquidation n’est plus imposé (après l’impôt anticipatif de 10 %), alors que lorsque des réserves de liquidation n’ont pas été constituées, le boni est taxable à 30 %.

Le deuxième avantage intervient en cas de cession des actions de la société. En effet, le régime VVPR-bis dont peuvent bénéficier les actionnaires d’une société n’est pas transposable aux acheteurs des actions d’une telle société (la condition de détention de façon ininterrompue depuis l’apport, n’étant plus respecté).

De plus, il n’est pas toujours possible de bénéficier du régime VVPR-bis (apports effectués avant le 1er juillet 2013, par exemple).

Conclusion

Le régime VVPR-ter s’est imposé depuis près d’une décennie comme un levier fiscal efficace pour les PME souhaitant différer la taxation de leur distribution de bénéfices sous une forme allégée. En contrepartie d’une cotisation distincte de 10% et du respect d’un délai de blocage de cinq ans, ce mécanisme permet une distribution future à un taux de précompte réduit, ramenant l’imposition globale à environ 13,64 %, contre 30 % en régime ordinaire. Ce différentiel justifie pleinement, d’un point de vue économique, le recours à cette planification.

Néanmoins, les réformes aujourd’hui entérinées — relèvement du taux de précompte à 6,5 % et réduction du délai de blocage à trois ans — amorcent un réalignement du régime VVPR-ter sur celui du VVPR-bis. Si cette évolution peut être perçue comme une simplification ou une harmonisation du traitement fiscal des dividendes différés, elle remet également en question l’avantage différentiel qui justifiait la constitution de réserves de liquidation distinctes affectant ainsi la planification financière de nombreuses entreprises.

Les sociétés concernées ont donc tout intérêt à anticiper ces évolutions potentielles et à évaluer, dès à présent, les opportunités d’optimisation encore offertes par le cadre actuel. Une bonne gestion fiscale passe, plus que jamais, par une veille réglementaire attentive et une stratégie proactive.

Sources

 

Publication : 29/09/2025