Nous vivons actuellement dans un monde de réglementations, de droits et de libertés, mais aussi d’obligations. Il arrive fréquemment que certains les ignorent, volontairement ou non. Ce genre d’agissements peut, suivant les cas, nuire gravement à l’intérêt public et au bien-être de la société.
Certaines personnes, indignées, vont alors tenter de l’empêcher, quitte à en subir les conséquences. Plusieurs réglementations spécifiques avec pour objectif de protéger ces personnes appelées « les lanceurs d’alertes » ont émergés à travers les différents États membres de l’Union, créant des régimes de protection parfois très disparates et inégaux à travers l’Union européenne.
Le législateur européen a donc décidé d’offrir à ces gens un régime de protection minimale uniforme partout en Europe.
La loi prévoit trois voies de signalement possibles, toutes mises sur un pied d’égalité : le signalement interne, externe et la divulgation publique.
Le but est de permettre au lanceur d’alerte de choisir la meilleure voie à emprunter, mettant ainsi un terme à la controverse de la nécessité de suivre ou non une procédure échelonnée.
Ceci étant dit, les travaux parlementaires établissent malgré tout une certaine hiérarchie entre les procédures en disant que la procédure interne représente la voie la plus appropriée dès lors qu’elle semble offrir un équilibre entre les différents intérêts en présence. Les circonstances dans lesquelles la procédure interne peut être privilégiée sont : une remédiation à la violation efficace en interne possible et aucun risque de représailles.
Les circonstances dans lesquelles un signalement externe peut représenter la voie la plus appropriée sont : une remédiation à la violation efficace en interne impossible, la présence de risques de représailles, une exigence particulière du droit de l’union ou du droit national de recourir à la procédure externe, ou encore le fait que l’entité qui fait l’objet du signalement n’est pas tenue d’établir des canaux et procédures de signalement interne.
Sauf exception prévue par le Roi, toutes entreprises comptant 50 travailleurs ou plus sont tenues de mettre en place des canaux et des procédures de signalement interne et de suivi permettant au moins à leurs travailleurs de signaler des informations sur des violations.
Le choix de la personne (ou du service) chargée de la réception et du suivi des signalements doit garantir son indépendance et l’absence de tout conflit d’intérêts. À cette fin, il faudra veiller à ce qu’aucune instruction ne soit donnée au gestionnaire du signalement concernant l’exercice de ses fonctions, dans un dossier concret. Ce dernier doit être protégé de sorte qu’aucune décharge de dossier ou pénalité ne peut lui être imposée. Le gestionnaire doit pouvoir rendre des comptes directement au plus haut niveau de direction. Les travaux parlementaires précisent également que l’obligation de secret professionnel n’empêche pas de contacter l’autorité de surveillance ou de lui demander conseil. Ce service peut être géré en interne ou peut être externalisé (uniquement pour les entités du secteur privé)
Les procédures de signalement interne et de suivi doivent comprendre au minimum les points suivants :
Les autorités compétentes chargées de gérer les signalements seront désignées par le Roi, en l’absence de désignation, ce sont les médiateurs fédéraux qui seront compétents. La procédure minimale à prévoir par les autorités est très similaire à celle prévue pour les entités du secteur privé.
La seule différence concerne l’obligation de communiquer à l’auteur du signalement les résultats finaux de l’enquête qui aurait été déclenchée par le signalement
La loi précise également l’obligation pour tout service public qui aurait réceptionné par erreur un signalement, de le transmettre, sans délai, de manière sécurisée, à l’autorité compétente qui en assurera en accusera réception auprès de l’auteur et en assurera le suivi.
Enfin il est possible que cette violation soit qualifiée d’importance mineure et ne requiert pas d’autre suivi que la clôture de la procédure. En pareil cas, les autorités compétentes devront le notifier à l’auteur en motivant la décision.
La loi prévoit l’obligation, pour les membres du personnel des autorités compétentes, de suivre des formations spécifiques en la matière.
Elles ont également l’obligation de publier sur une page internet identifiable aisément, les modalités et conditions de la protection en matière de signalements de violation.
La divulgation publique offre une protection à son auteur à condition que ce dernier ait effectué un signalement interne et/ou externe et qu’aucune mesure appropriée n’a été prise en réponse, dans les délais légaux. L’auteur doit également avoir des motifs raisonnables de croire que la violation constitue un danger imminent ou manifeste pour l’intérêt public ou, en cas de signalement externe, il existe un risque de représailles ou il y a peu de chance que la violation soit remédié.
Dans ce troisième article, nous avons terminé notre voyage à travers le régime de protection des « lanceurs d’alertes » uniformisé au niveau européen. Ce régime accorde une protection minimale de sorte que chaque État peut prévoir des régimes plus favorables.
Après avoir lu cet article, vous en savez plus sur les procédures à mettre en place et à suivre dans le cadre de ce régime.
Le législateur Européen a instauré cette protection des lanceurs d’alertes via une directive adoptée le 23 octobre 2019 : la directive UE 2019/1937 sur la protection des personnes qui signalent des violations du droit de l’Union).
Ensuite, l’Etat belge a transposé cette directive via la loi du 28 novembre 2022 sur la protection des personnes qui signalent des violations au droit de l’Union ou au droit national constatées au sein d’une entité juridique du secteur privé.